Le Parc national des Pingualuit
En Inuit, Pingualuit est un mot qui fait référence, en français, au bouton d’acné.
Le tapis de la toundra qui recouvre le Nunavik s’imbibant facilement d’eau, tel une éponge, combiné à la lumière irradiante de l’astre du jour qui règne nuit et jour sur le court été nordique à ces latitudes septentrionales, est propice à éclosion d’une myriade de petits fruits qui viennent assaisonner les terres du Grand Nord du Québec.
Au Nunavik, l’arrière-saison débarque bien avant l’équinoxe d’automne, dès la mi-août. La cueillette des baies sauvages bat alors déjà son plein, et ce jusqu’à l’arrivée des premières neiges en octobre. Les femmes inuites, surtout, y consacrent des journées entières, souvent accompagnées de leurs enfants, parfois même de leurs hommes, qui se régalent tout en récoltant ces délicieux petits fruits que leur offre Mère Nature.
Les premières baies à faire leur apparition sont les bleuets et la camarine noire, qu’on récolte dès la fin juillet jusqu’au premier gel en septembre, parfois même jusqu’en octobre. Les bleuets, qui, au Québec, ressemblent plus à la myrtille qu’on connaît en France, se retrouvent autant dans la taïga que sur la toundra, certaines variétés de bleuets poussant en petits bosquets, alors que d’autres, plus petits mais ô combien délectables, arrivent à prospérer à ras le sol. Quant à la camarine noire, cette petite plante rampante omniprésente sur tout le territoire, dont les baies juteuses ressemblent aux bleuets en apparence, auxquels elle s’apparente d’ailleurs, elle se distingue par son goût hors du commun que les Inuit adorent et qui, quand ils en mangent une bonne poignée, voient leur sourire se teinter de violet.
Traditionnellement, ces baies servaient à réduire les douleurs gastriques. Ça explique peut-être pourquoi les Inuit en font depuis toujours une salade de fruits bien à eux, le suvalik, concoctée avec une sorte de mayonnaise à base d’œufs de poissons et de misiraq, une huile de phoque fermentée. Un goût qui s’acquiert !
En août, les Inuit redoublent d’ardeur à la tâche, alors que la chicouté, qu’ils appellent aqpik dans leur langue, surgit ici et là dans les tourbières. Bourrée de vitamine C, cette baie sauvage est sans conteste leur favorite. Sorte de mûre aux teintes orangées, aussi connue comme ronce petit-mûrier ou plaquebière, elle abonde surtout dans les parties méridionales du Nunavik. Et comme elle préfère les milieux humides, voire marécageux, les femmes inuites doivent composer avec les moustiques qui y prolifèrent aussi pour récolter ce précieux butin dont elles feront de délicieuses confitures. Cette activité est si populaire que Kuujjuaq, la « métropole » de la région, tient chaque année en août un festival musical en son honneur, l’Aqpik Jam, qui est aussi l’hôte d’un concours de cueillette de ce petit fruit prisé des Inuit.
Plus tard, en octobre, viendra le temps de récolter les airelles rouges, de petites canneberges (ou atacas, en bon québécois) qui sont prêtes à cueillir juste à temps pour en faire une bonne sauce d’accompagnement pour la dinde de l’Action de Grâce. Mais c’est surtout pour leurs propriétés médicinales que les Inuit en feront une réserve, ces délicates baies aigres-douces étant, une fois écrasées, une pommade miracle pour contrer les aphtes dans la bouche. Sans compter que, tout comme les canneberges, elles peuvent aussi agir d’antioxydant, et même aider à prévenir ou soigner les infections urinaires. Et si on vient à en manquer au courant de l’hiver, on pourra toujours attendre le retour du printemps pour en récolter d’autres gorgées d’eau de la fonte des neiges.
Petit lexique :
Dans la langue des Inuit, l’inuktitut
• Bleuet (myrtille) : kigutanginnaq (kigutanginnait au pluriel)
• Camarine noire : paurngaq (paurngait au pluriel)
• Chicouté (ronce petit-mûrier ou plaquebière) : aqpik (aqpiit au pluriel)
• Airelle rouge : kimminaq (kimminait au pluriel)
En Inuit, Pingualuit est un mot qui fait référence, en français, au bouton d’acné.
Eeyou Istchee Baie-James, Le Nord-du-Québec
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