Visiter Montréal
À la fois une porte d’entrée et destination, portuaire et montagneuse, francopho
La ville souterraine de Montréal est depuis longtemps l’objet d’idées reçues et même de fantasmes. Encore beaucoup d’Européens s’imaginent que les Montréalais vivent sous terre durant tout le long hiver, se réfugiant dans une sorte de ville sous la ville. Cassons tout de suite le mythe : ces galeries qui s’étendent sous le centre-ville de Montréal ne sont pas faites pour hiberner, même si, c’est vrai, elles peuvent s’avérer bien pratiques pour déjouer temporairement les excès du climat, par grand froid comme par temps de canicule. Reste que le sous-sol de la métropole québécoise est bel et bien parcouru par des dizaines de kilomètres de tunnels et de galeries piétonnes.
Ce ne sont pas moins de 32 km de galeries piétonnières qui composent le Montréal souterrain, connu depuis 2004 sous le nom de RÉSO. Ces tunnels représentent une surface totale de 12 km2, ce qui en fait effectivement le plus vaste complexe piétonnier souterrain de la planète. Au niveau de l’arrondissement de Ville-Marie, où s’étend le cœur du RÉSO, ce dernier représente 80 % de l’espace de bureaux et plus d’un tiers de l’espace commercial. Sièges sociaux, tours de bureaux, banques, hôtels, résidences de luxe, bâtiments universitaires, centres commerciaux, restaurants, boutiques, cinémas, gares et stations de métro : 60 complexes résidentiels et commerciaux sont reliés entre eux. C’est une véritable ville dans la ville qui est interconnectée et accessible grâce au RÉSO !
Dans les années 1950, le maire de Montréal, Jean Drapeau, imagine un vaste plan de modernisation de la ville comprenant la construction du métro de Montréal et l’édification de la Place Ville-Marie (1962), un complexe immobilier composé de cinq immeubles de bureaux (dont la plus grande tour est le 4e plus haut gratte-ciel de Montréal) lesquels surplombent une esplanade et un vaste un centre commercial souterrain. Un tunnel reliant la place Ville-Marie à la gare centrale de Montréal et à l’hôtel de luxe Fairmont Le Reine Elizabeth est alors créé. Le Montréal souterrain est né. Mais le cœur du réseau se formera vraiment à partir de l’ouverture du métro en 1966, avec la création de plusieurs tunnels connectant les stations Bonaventure et Square-Victoria à différents édifices tels que la tour de la Place du Canada, le Château Champlain, la gare de Windsor ou encore la tour de la Bourse. Le réseau va s’étendre encore en 1974, avec la construction du Complexe Desjardins, puis de plus belle dans les années 1980, quand seront édifiés trois nouveaux grands centres commerciaux reliés entre eux par des tunnels : Les Cours Mont-Royal, les Promenades de la Cathédrale et la place Montréal Trust.
En 1989, la ville souterraine peut se targuer de compter 22 km de galeries. D’autres grands projets ont depuis étendu ce véritable labyrinthe caché : le 1000 de la Gauchetière, le 1250 René-Lévesque, le Centre de commerce mondial de Montréal, le tunnel entre le centre Eaton et la place Ville-Marie ou encore le Centre Bell, dont la construction a permis d’intégrer la station de métro Lucien-L’Allier au Montréal souterrain. La dernière grande phase d’extension du RÉSO nous emmène dans les années 2000 avec la reconstruction du Quartier international de Montréal et la jonction entre certains maillons manquants, comme entre la place Bonaventure, la station Square-Victoria et le Palais des Congrès, ou la section Place-des-Arts/Place d’Armes jusqu’au Centre Bell.
Quatre grands segments composent le RÉSO. Le plus célèbre et le plus fréquenté est le segment central, au cœur de l’arrondissement de Ville-Marie. Il englobe la station Peel (elle-même relié à une dizaine d’édifices, dont la Tour Scotia, le Centre Mont-Royal, le Carrefour Industrielle Alliance ou encore le Centre Bell), mais aussi la station McGill (Centre Eaton, Tour KPMG, La Baie), la station Bonaventure (Le 1000 de la Gauchetière, Place Bonaventure, Gare Centrale, Gare Windsor, etc.), la station Lucien-L’Allier, la station Square-Victoria (Complexe Maisonneuve, Centre de commerce mondial de Montréal, Tour de la Bourse…), la station Place-d’Armes (Palais des Congrès, Basilique Notre-Dame) et la station Place-des-Arts (UQAM, Musée d’art contemporain, Complexe Desjardins, Hydro-Québec…). Les trois autres segments principaux du RÉSO sont le segment Berri-UQAM, le segment Guy-Concordia et le segment Atwater, à l’ouest du centre-ville. D’autres stations de métro en marge du centre-ville de Montréal sont par ailleurs connectées au RÉSO, telles les stations Pie-IX (Stade olympique), Jean-Talon ou encore Longueuil–Université-de-Sherbrooke. Une vraie toile d’araignée sous l’île de Montréal !
Grâce à son étendue approchant les 33 km et aux connexions qu’il offre avec les lignes du métro, le Montréal souterrain permet en effet d’arpenter le centre-ville montréalais de long en large sans avoir à mettre le nez dehors. Imaginez-vous en pleine tempête hivernale alors que vous avez différents rendez-vous à honorer ou visites à faire à Montréal dans la journée. Vous trouverez facilement l’un des 190 points d’accès extérieur du RÉSO et vous pourrez vous déplacer, à pied et par le métro, dans tout le centre-ville et les quartiers environnants sans avoir à vous camoufler sous une tuque (bonnet). On ne s’étonne pas que près d’un demi-million de personnes empruntent chaque jour le RÉSO, avec bien entendu des pics de fréquentation durant l’hiver. Mais s’abriter et se déplacer sont loin d’être les seuls intérêts du Montréal souterrain…
En visite à Montréal, vous avez forcément prévu de magasiner et de casser la croûte. Sachez que vous pourrez faire tout cela au chaud – ou au frais, selon la saison ! – en empruntant les galeries du RÉSO. Montréal ville souterraine, ce sont près de 2 000 boutiques, restaurants et aires de services qui fonctionnent toute l’année, quel que soit le climat. Il y en a vraiment pour tous les goûts et les budgets. Pour ramener de beaux souvenirs artisanaux de la métropole québécoise, on vous conseille le magasin L’Art des artisans du Québec, situé au Complexe Desjardins, ou vous trouverez aussi la Joaillerie St-Jean ou l’incontournable librairie Renaud-Bray. Pour la séance de relooking, direction par exemple les Cours Mont-Royal où de grands noms de la haute couture comme Lagerfield, Prada, Mackage et DKNY ont « pignon sur galerie ». Un petit creux ? Sachez que tous les centres commerciaux de Montréal reliés par le RÉSO sont pourvus d’aires de restauration. La plus fameuse d’entre elles est sans aucun doute le Time Out Market, au Centre Eaton de Montréal, un food court géant ou certaines des adresses montréalaises les plus réputées tiennent un comptoir, à l’image de Toqué!, du Red Tiger ou de Moleskine. On apprécie aussi Le Cathcart, à Place Ville-Marie, pour son art de faire voyager les papilles sans quitter le sous-sol avec sa multitude de restaurants et de comptoirs : cuisine asiatique, mexicaine, italienne, libano-montréalaise, bols de poké, bagels, burgers…
Si les amateurs d’architecture urbaine peuvent s’offrir de beaux safaris photos à la recherche des puits de lumière, des édifices et des places les plus spectaculaires desservies par le RÉSO, des trouvailles culturelles attendent en fait tous les amateurs d’art et de culture sous la surface de Montréal. Pour commencer, la ville souterraine est reliée au quartier des Spectacles, à la Place des Arts et au Musée d’art contemporain de Montréal. Déjà de quoi faire, en termes de spectacles, d’expositions et d’événements culturels tout au long de l’année, sans compter les cinémas abrités par les centres ! Mais saviez-vous que les galeries du Montréal souterrain devenaient elles-mêmes de véritables galeries d’art à certaines occasions ? Chaque printemps, le festival Art Souterrain investit de nombreux lieux emblématiques du RÉSO, tel le Centre Eaton, le Centre de commerce mondial, la Place de la Cité internationale, ou encore les sous-sols du Palais de Congrès et de la place Ville Marie, pour proposer des expositions et des performances, histoire d’amener l’art où on ne l’attend pas. Il arrive aussi que l’événement Nuit Blanche, dans le cadre du festival Montréal en Lumière, programme certains de ces événements nocturnes sous les arcanes de la ville et dans les édifices que le RÉSO dessert.
Il se dresse au Centre de commerce mondial de Montréal, dans Ville-Marie, du côté de l’entrée de la rue Saint-Pierre. Ce morceau de bêton du Mur de Berlin – érigé en 1961 en pleine guerre froide et détruit le 9 novembre 1989 – affiche une hauteur de 3,60 m pour 1,20 m de largeur et il est naturellement couvert de graffitis. Mais que fait cet émouvant témoin de l’histoire ici ? Il s’agit d’un don de la ville de Berlin à la ville de Montréal à l’occasion du 350e anniversaire de cette dernière qui fut célébré en 1992, soit seulement 3 ans après la chute du Mur. Pour la petite histoire et pour les connaisseurs, ce fragment proviendrait des environs de la célèbre porte de Brandebourg et ferait partie de la 4e génération du Mur de Berlin.
N’en déplaise aux plus intrépides, Montréal ne cache pas sous sa surface l’équivalent des catacombes de Paris. En revanche, vous serez peut-être étonnés de savoir que le Montréal souterrain est, en fait, loin de se limiter aux 32 km de tunnels du RÉSO. De nombreux édifices publics très connus font en quelque sorte bande à part en étant reliés entre eux par leurs propres galeries souterraines. C’est le cas sur le campus de l’Université McGill, en plein centre-ville, mais aussi de l’Université Concordia, de l’UQAM, de l’Université de Montréal ou encore de l’École de technologie supérieure, dont les pavillons sont reliés entre eux par deux tunnels. On pourrait aussi citer le Complexe La Cité, sur l’avenue du Parc, mais également les pavillons du Musée des beaux-arts de Montréal (un tunnel passant sous la rue Sherbrooke permet de les connecter) et du musée Pointe-à-Callière, dans le Vieux-Montréal, dont le pavillon principal communique avec l’ancienne douane de la place Royale via une galerie souterraine accueillant des expositions et d’importantes fouilles archéologiques. Et puis, si vous êtes définitivement allergiques à l’air libre, n’oubliez pas que vous disposez de l’ensemble du métro de Montréal – le troisième plus grand réseau d’Amérique du Nord après New York et Mexico – pour explorer la ville autrement : 68 stations, 71 km de bonheur souterrain !
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